Les Chanoines Comtes de Lyon et leurs liens avec Saint-Chamond : autour de la Maison des Chanoines

Le chapitre cathédral de Lyon, réorganisé au début du IXᵉ siècle par Leidrade, fut l’un des plus prestigieux du royaume de France. Ses membres, appelés chanoines-comtes à partir du XIVᵉ siècle, incarnaient une noblesse ecclésiastique dont l’influence dépassait largement les frontières du Lyonnais. Leur présence a laissé des traces non seulement à Lyon, mais aussi dans le Forez et le Jarez, notamment à Saint-Chamond, où subsiste encore aujourd’hui une mystérieuse Maison des Chanoines dont l’origine reste incertaine.

Les Chanoines-Comtes de Lyon : élite ecclésiastique et nobiliaire

Pour être admis au chapitre de Saint-Jean, il fallait prouver une noblesse complète sur quatre générations. Cette exigence en fit un corps d’élite, souvent engagé dans la défense des intérêts urbains, comme lors des révoltes des ouvriers en soie au XVIIIᵉ siècle. La Révolution supprima le chapitre, rétabli ensuite par le Concordat sous une forme amoindrie.

Dès le Moyen Âge, les chanoines lyonnais avaient acquis le titre de comtes, reconnu par le roi entre 1307 et 1312, dans le cadre du règlement des conflits opposant archevêques et comtes de Forez. Ils cumulèrent des fonctions religieuses et temporelles, mêlant gestion de seigneuries, exercice de la justice et représentation politique.

Les familles de Jarez et de Saint-Priest : chanoines et seigneurs

Les liens entre Lyon et Saint-Chamond se révèlent au XIIIᵉ siècle avec la famille de Jarez. L’un de ses membres, Gaudemard de Jarez, devint chanoine comte de Lyon et chamarier de l’Église de Lyon. Dans son testament du 12 mars 1254, il demanda à être inhumé à l’abbaye de Valbenoîte et transmit à son frère Guy de Jarez, seigneur de Saint-Chamond, plusieurs biens, dont ses maisons dans le cloître lyonnais.

Au XVe siècle, Antoine de Saint-Priest, descendant d’une branche issue des seigneurs de Saint-Chamond, fut reçu comme chanoine comte en 1474, après avoir produit ses preuves de noblesse aux chanoines. Ces allers-retours entre charges ecclésiastiques lyonnaises et seigneuries foréziennes illustrent l’imbrication étroite du temporel et du spirituel dans la région.

La Maison des Chanoines à Saint-Chamond : une survivance énigmatique

À Saint-Chamond, l’existence d’une « Maison des Chanoines », bâtiment encore conservé mais d’origine mal connue, pourrait trouver une explication dans cette présence répétée de chanoines lyonnais issus des familles locales. Les legs de Gaudemard de Jarez, ou encore les possessions attestées dans le cloître de Lyon et redistribuées à des parents seigneurs du Jarez, pourraient avoir contribué à la fondation d’un tel établissement. Bien que la documentation reste lacunaire, il est permis d’avancer l’hypothèse que cette maison fut liée au rôle de relais seigneurial et spirituel des chanoines lyonnais dans la vallée du Gier.

L’histoire des chanoines-comtes de Lyon, au carrefour des sphères spirituelles et temporelles, ne peut être dissociée des grandes familles foréziennes, notamment celles de Jarez et de Saint-Priest. Leur mémoire se perpétue dans le paysage de Saint-Chamond à travers la mystérieuse Maison des Chanoines.

Pour approfondir ce sujet et découvrir le détail des filiations, des testaments et des sources, le lecteur pourra se référer à l’ouvrage d’Éric Moulin-Zinutti, disponible aux éditions Mémoires et Documents.

Références archivistiques

• Archives départementales du Rhône, 10G 2240 ; 10G 2257 ; P4932, cote 1112 : Testament de Gaudemard de Jarez (1254).

• Archives départementales du Rhône, 10G 511 : preuves de noblesse d’Antoine de Saint-Priest (1474).

• Archives nationales, K.24, n°14 ; P1400 1, n°843 et n°845 : traité de permutation (1173-1174).

• Musée du diocèse de Lyon, nécrologie de Renaud du Forez (XIIIᵉ s.).

• Henri Hours, Église à Lyon, n°19, 2002.